... [Pv]

Une chose avant de commencer: Heureusement qu'il n'avait pas l'esprit pervers... Ou plutôt, heureusement que ce dernier n'était pas fonctionnel à cet instant précis (ou si peu...).
Soit, passons. ils avaient marché, sans un mot, sans même se toucher, la main de Yuu tripotant machinalement ses si précieux chiffons craquants et froissés dans sa poche (seule occupation trouvée pour ces dernières), ses yeux dévorant dés qu'ils en avaient la possibilité Miharu. A présent, la porte avait claqué et le silence régnait de nouveau, laissant le Numéro 4 détourner un moment son attention du jeune homme pour s'intéresser à l'état de sa chambre. Yuu était l'une de ces personnes que l'on appelle les maniaques bordéliques: Il met le bordel, et une fois que le bordel est mis, la seule chose qui le préoccupe, c'est de le ranger. Mais attention, pas "le ranger" tel un bordélique le penserait, mais vraiment le désir de ranger. En gros, le bordel des autres ne le dérange pas, le sien seulement l'insupporte. Tout ce qui importait, en effet, c'était le lit. Ou autre, ça marchait aussi ,mais le lit est tout de même le plus agréable qu'il avait pu tester jusque là, il fallait l'avouer.

... Suffisant? Je veux bien croire que l'esprit tout innocent de Miharu veuille bien parler de la chambre, et de la chambre uniquement (voire du lit), mais "suffisant" n'était pas le mot qui convenait le mieux au jeune homme. A vrai dire, il ne lui convenait pas du tout. S'il croyait que voir sa chambre ou même son lit lui suffirait, il se trompait, et pas qu'un peu. Non, s'il était là, ce n'était pas pour une visite guidée... Ca y est, le point de non-retour était atteint. C'est simple, si Miharu ne le sentait pas pour une raison quelconque, le jeune blond serait contrait de le forcer (pour ne pas dire le violer...). Ses yeux vagabondèrent encore quelques instants le long des murs et sol de la n°45 jusqu'à recroiser sur ce vague passage le corps du Numéro 3, si envieux et à présent à portée de main. Ce dernier point laissa discrètement se dessiner un sourire imperceptible sur le visage de Yuu, qui décidément ne se lassait de le regarder. Ses yeux se plissèrent un court instant, rendant sa pupille un peu plus dense, de désir, probablement. Sans un mot, il ôta dans un mouvement simple appartenant à la vie de tous les jours son t-shirt, et le balança dans un coin, le suivant des yeux, pour être sûr de le retrouver parmi tout ce glorieux bordel.
Ses yeux restaient braqués un moment sur le tas blanchâtre qu'était censé donc être son dit t-shirt, bien maltraité, laissant un frisson parcourir sa peau nue pendant une courte seconde. Il n'était ni osseux, ni musclé, il était juste frêle mais non fragile. Sa peau pâlie par l'Amérique Nordique ne laissait en rien des marques de violences qu'il avait subit... plus jeune. Ne nous attardons pas sur le sujet. Une cigarette, une cigarette, il voulait une cigarette. Le besoin de sentir le filtre de coton puant le tabac entre ses lèvres, la pourriture de fumée se déposant au creux de ses poumons l'obligeant par moment à tousser jusqu'à l'épuisement. Oui, il avait envie de cette merde. Il avait besoin de cette merde. Mais là, ce n'était pas possible, pas maintenant, pas ici. Bien que le propriétaire de la chambre semblait être un tout aussi gros fumeur, il ne pouvait se le permettre, par respect et tout simplement parce qu'il savait qu'il allait se la faire voler par l'autre >>. Pour ne pas être tenté, pour atténué ce besoin, il se mordit l'intérieur de la joue, peut-être jusqu'à sang, il ne s'en rendait pas compte, il ne s'en rendait plus compte, la douleur étant quelque chose dont il avait fait abstraction depuis bien longtemps. Pourquoi? Parce que souffrir ne sert à rien. Bien entendu, mettez lui un pain dans la gueule, il souffrira quand même.
Les yeux toujours fixés sur son t-shirt, il avait gardé son air tout à fait indifférent, impassible, et imperturbable tandis qu'il luttait intérieurement contre sa dépendance au tabac... Sans compter le fait qu'il était à moitié nu, quand même. Mais apparemment, ça n'avait pas l'air de le déranger plus que ça. Pendant ce court silence, ses pensées se mélangeaient, passant des rêves aux fantasmes, des souvenirs aux cauchemars. Et puis il "reprit conscience". Oui, durant ce silence d'à peine 5 secondes, il était parti, on ne sait où, on ne sait pourquoi, ça lui arrivait. Perdre le contrôle de soi-même, quelque chose que d'habitude Yuu se refusait catégoriquement. Son regard, dans un léger mouvement de tête le suivant, vint se poser de nouveau sur Miharu, tout en plongeant les mains au plus profond de ses poches pour caresser le papier qui allait finir par se déchirer à force de recevoir autant d'attention.

Ses yeux avaient quelque chose d'insistant, son sourire inexistant aussi. Dans une marche paresseuse, il s'avança doucement vers le Numéro 3, soutenant son regard le plus longtemps possible jusqu'à arriver à seulement un mètre de sa personne, penchant légèrement la tête sur le côté pour laisser un seul de ses yeux visibles à Miharu.